PANDORE

C’est une Pandore à l’usage du peintre.
C’est l’art difficile de voir, les écueils, les tromperies et les illusions que celui-ci a libérés.
La première des femmes dort. Elle se détourne du spectacle qu’elle donne d’elle-même. Sa conscience est dans l’ombre.
Elle est donc innocente, et sa nudité l’expose.
La boîte a été ouverte pendant son sommeil, pendant sa distraction.
Les maux échappés sont invisibles, en suspension dans l’espace.
Une présence était là, qui après de vaines tentatives pour décrire la beauté de l’idole a quitté la pièce rageusement et ouvert la boîte, peut-être.
Pandore, morceau lunaire, amande du tableau, captant au seul profit de son marbre voluptueux toute la lumière de la chambre.
Au mur, les quatre illusions majeures de l’image entourent celle, suprême de la réalité ; une petite photographie sépia, une grande peinture encadrée qui évoque la convention théâtrale des fonds italiens, paysage, ville, montagne, ciel. A gauche un dessin, à droite un miroir.
Eros est dans cette lumière latérale qui trousse littéralement l’endormie en faisant remonter bien haut sa robe d’ombre.
Seul le premier plan central du tableau est dégagé, ouvrant une avenue au regard de l’indiscret et donnant à voir ce joyau : une femme accessible et inaccessible à la fois.

Pascal Vinardel

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